Plusieurs signaux annoncent une récession mondiale pour 2023. Parmi ces signaux, mentionnons la guerre en Ukraine, le resserrement des conditions financières et un ralentissement économique simultané en Europe, en Chine continentale, dans de nombreux marchés émergents et aux États‑Unis.
L’économie connaît un ralentissement en raison de la persistance de l’inflation, de l’augmentation des coûts d’emprunt, de la détérioration de la confiance du secteur privé et du ralentissement rapide de l’activité économique mondiale. La pression continue sur les coûts, l’affaiblissement de la demande et l’incertitude croissante incitent certaines entreprises à prendre des décisions de plus en plus conservatrices en matière de talents et d’investissements.
Dans ce contexte, les catalyseurs de l’activité économique qui étaient auparavant considérés comme acquis mériteront désormais une plus grande attention de la part des conseils d’administration. Pour transformer l’incertitude en possibilités, les conseils d’administration devront se concentrer sur cinq principes fondamentaux pour aider leurs entreprises à traverser cette période.
1. L’inflation
Le déséquilibre entre l’offre et la demande dans le secteur de l’énergie, qui découle des tensions géopolitiques et des changements climatiques, n’est pas près de se résorber. Il faut s’attendre à une volatilité accrue compte tenu de l’inflation des prix de l’énergie, des matières premières et des denrées alimentaires.
Bien qu’il s’agisse peut‑être d’une nouvelle expérience pour de nombreux administrateurs établis aux États‑Unis et au Canada, les conseils d’administration en Amérique latine ont sans doute une expérience plus pertinente de la lutte contre l’inflation. Dans tous les cas, les conseils d’administration devraient surveiller la manière dont les entreprises élaborent leurs stratégies de fixation des prix et d’approvisionnement, lesquelles devraient être suffisamment souples pour répondre à des fluctuations de la demande plus importantes que celles observées au cours des dernières décennies. Ils doivent également prendre en compte le rôle de la gestion des coûts et des gains de productivité de l’entreprise dans sa stratégie de lutte contre l’inflation.
2. La main‑d’œuvre
Alors que les entreprises américaines avaient l’habitude de licencier la main‑d’œuvre excédentaire pour limiter les coûts en période de ralentissement économique, aujourd’hui, le talent n’est pas seulement plus coûteux, il est aussi perçu comme ayant plus de valeur. Les dirigeants d’entreprise privilégient actuellement des mesures stratégiques de gel d’embauches, de licenciement, d’attrition et de mise à pied comme mesures de contrôle des coûts plutôt que des licenciements à grande échelle.
Les conseils d’administration devront garder un œil sur le programme de gestion à long terme des talents, en veillant à ce que la productivité, la formation et les gains d’efficacité compensent l’augmentation des coûts de main d’œuvre et maintiennent l’engagement des salariés lorsqu’il est possible de réembaucher.
3. Coût du capital
Le resserrement rapide et synchronisé de la politique monétaire au niveau mondial a entraîné une hausse des taux d’emprunt, une correction des prix des actions et des fluctuations importantes des taux de change. La hausse du coût de la dette incite à mettre l’accent sur les choix possibles pour atteindre les objectifs stratégiques, tandis que les fortes fluctuations des évaluations des actions ont créé un fossé entre la perception qu’ont les acheteurs et les vendeurs de la valeur sous‑jacente d’un actif. Les conseils d’administration peuvent s’associer à la direction pour étudier les plans de l’entreprise en matière de stratégie financière.
4. Chaîne d’approvisionnement
La transition que certaines entreprises ont opérée pendant la pandémie, en passant d’une gestion des stocks « juste à temps » à une gestion des stocks « en cas de besoin », pourrait ne pas être viable, et certaines entreprises pourraient être soumises à une nouvelle pression lorsque la demande ralentira et que les stocks s’accumuleront.
En outre, les bouleversements géopolitiques modifient rapidement l’environnement commercial et redéfinissent les risques et possibilités liés à la chaîne d’approvisionnement, ce qui incite les entreprises à explorer des stratégies de relocalisation. Les conseils d’administration peuvent superviser la manière dont la direction équilibre les risques et la redondance de la chaîne d’approvisionnement dans un monde de plus en plus fragmenté.
5. La transition énergétique
Les répercussions de la guerre en Ukraine sur l’approvisionnement en énergie et les préoccupations en matière de sécurité énergétique, ainsi que d’autres impacts des changements climatiques, perturbent l’activité économique en temps réel et mettent en relief l’urgence de la transition énergétique. Bien que les pressions inflationnistes risquent de retarder certains plans, les conseils d’administration peuvent collaborer avec la direction pour déterminer s’il s’agit d’une occasion d’accélérer la transition.
L’avenir en matière de décarbonisation
Les conseils d’administration ont pour principale mission d’orienter la direction sur ces principes en soumettant les plans à des tests rigoureux et en évaluant les multiples options permettant d’atteindre les objectifs stratégiques dans des circonstances microéconomiques et macroéconomiques volatiles et incertaines.
Les administrateurs sont bien placés pour demander quels scénarios ont été envisagés (même les plus improbables) et quels en seraient les effets éventuels sur le rendement financier, la croissance et la stratégie. Quel que soit le scénario retenu, la direction doit disposer d’une stratégie et d’un bilan appropriés pour faire face aux conditions économiques à venir, et les conseils d’administration peuvent l’aider à se préparer à cette incertitude.