Comment les sociétés minières argentifères peuvent renforcer leur compétitivité à long terme

Dans une période où la hausse de la demande fait pression sur les chaînes d’approvisionnement, les sociétés minières argentifères travaillent à stimuler la productivité en plaçant le développement durable au cœur des priorités.

En bref

• La tendance haussière des prix de l’argent incite les sociétés minières argentifères à accroître la production et à chercher des occasions de F et A.
• Le développement durable et les pratiques responsables en matière d’exploitation minière sont au premier plan des initiatives stratégiques.
• La mise en œuvre de processus d’extraction novateurs et la numérisation aideront les sociétés minières à dégager de la valeur à long terme. 

L’argent, qui est utilisé dans les produits industriels et la fabrication de bijoux, et qui constitue un investissement attrayant, affiche un déficit structurel sur le marché pour la quatrième année de suite. En 2024, on estime l’augmentation de la demande mondiale d’argent à environ 2 % pour atteindre 1 219 millions d’onces, ce qui s’explique par son usage industriel accru, particulièrement dans la production de cellules photovoltaïques (solaires), et la hausse de l’achat de valeurs refuges en raison des tensions géopolitiques¹.

Cependant, l’offre demeure limitée en raison de la forte dépendance à l’égard de l’approvisionnement en sous‑produits dérivés d’autres produits de base, de la dégradation de la qualité des minerais et de la baisse des activités d’exploration. Cela a entraîné une augmentation des prix de l’argent, qui, en 2024, ont été en moyenne 44 % plus élevés qu’au cours de la dernière décennie. Cette tendance à la hausse devrait se poursuivre en 2025². Malgré l’expansion des activités actuelles et l’augmentation des activités de F et A, la dégradation de la qualité des minerais et la hausse des coûts d’exploitation continuent de poser des défis.

Les impératifs de durabilité demeurent au premier plan, les sociétés minières priorisant la gérance de l’environnement en misant sur les sources d’énergie renouvelables et les carburants de remplacement afin de décarboner les opérations. L’adoption de technologies de pointe dans l’ensemble de la chaîne de valeur de l’exploitation minière argentifère permettra de réduire les coûts et d’améliorer l’efficacité opérationnelle.

Les budgets consacrés à l’exploration demeurent peu élevés compte tenu des difficultés de financement, tandis que la production a connu une légère hausse

En général, les activités d’exploration sont demeurées modérées en 2024, car les difficultés macroéconomiques et les tensions géopolitiques ont entraîné des fluctuations des prix des métaux, et les sociétés minières, qui dépendent des marchés financiers pour le financement des activités d’exploration, ont connu un environnement de financement moins favorable.

On estime que le budget d’exploration combiné pour l’or, le cuivre, le zinc-plomb a diminué de 4,3 % d’un exercice à l’autre en 2024 pour atteindre 9,1 G$ US, principalement en raison d’une baisse de respectivement 6,8 % et 14,5 % des budgets d’exploration pour l’or et le zinc. De plus, on estime que le budget d’exploration pour l’argent primaire a diminué de 12,4 % d’un exercice à l’autre pour s’établir à 497 M$ US, celui de l’Amérique latine ayant diminué de 9,6 % pour s’établir à 304,2 M$ US et celui des États‑Unis ayant baissé de 4,6 % pour s’établir à 73,2 M$ US³.

Cependant, la production argentifère a connu une légère augmentation de 1 % d’un exercice à l’autre pour atteindre 837 millions d’onces, en raison de l’augmentation de la capacité de production des installations et de l’accroissement des activités qui avaient été temporairement interrompues en 2023⁴. Par exemple, au troisième trimestre de 2024, la production argentifère à la mine La Colorada de Pan American Silver a augmenté de 59 % par rapport au trimestre précédent à la suite de l’amélioration du système de ventilation⁵. À l’échelle régionale, le Mexique, le Chili et les États‑Unis ont soutenu la croissance de la production, contrebalançant une baisse de la production au Pérou, en Argentine et en Chine.

Les technologies énergétiques propres stimulent la demande d’argent

La consommation industrielle devrait avoir augmenté de 7 % pour s’établir à 702 millions d’onces en 2024, en raison des gains découlant des technologies vertes, en particulier les cellules photovoltaïques (solaires), qui sont à l’origine d’environ 20 % de la demande totale d’argent⁶. La demande devrait s’intensifier davantage à mesure que le secteur de l’énergie photovoltaïque se tourne vers la production de cellules à haut rendement, lesquelles requièrent de 30 % à 120 % plus d’argent⁷.

L’argent joue également un rôle crucial dans les véhicules électriques, sa conductivité remarquable en faisant un élément essentiel pour les contacts électriques dans l’ensemble du système électronique du véhicule. Le marché de l’argent est prêt à faire face à une forte augmentation de la demande provenant de l’industrie du véhicule électrique. On prévoit que les stocks de véhicules électriques (tous modes de transport confondus, à l’exception des véhicules à deux ou à trois roues) se chiffreront à 250 millions d’ici 2030, soit cinq fois plus qu’en 2023⁸.

La demande pour les bijoux en argent a aussi montré des signes de reprise et devrait augmenter de 5 % en 2024, l’Inde ayant grandement contribué à la croissance. Toutefois, les placements dans les produits physiques devraient avoir reculé d’environ 15 % pour s’établir à 243 millions d’onces, en raison des pertes subies aux États‑Unis, où les ventes de pièces et de lingots ont chuté drastiquement⁹.

Les activités de fusions et acquisitions se sont poursuivies alors que les prix ont atteint des sommets

Les prix de l’argent ayant atteint des sommets en 2024 et les nouvelles découvertes se faisant de plus en plus rares, les sociétés minières recherchent des occasions de fusions et acquisitions. En 2024, la valeur des activités mondiales de F et A dans les secteurs de l’argent, du plomb et du zinc a augmenté d’environ 380 % pour atteindre 3,9 G$ US, par rapport à 0,8 G$ US en 2023, les cinq transactions les plus importantes représentant près de 90 % de la valeur totale¹⁰.

En Amérique latine, la délocalisation à proximité s’est imposée comme une stratégie de F et A transformatrice. Elle procure aux sociétés minières des avantages importants en leur permettant d’améliorer l’efficacité opérationnelle et d’accéder à de nouveaux marchés, comme les États‑Unis et le Canada. Par exemple, First Majestic Silver a acquis les gisements de Gatos Silver pour un montant de 970 M$ US afin d’étendre ses activités au Mexique¹¹.

L’incertitude réglementaire et les coûts élevés persistants en Amérique latine demeurent des défis

L’Amérique latine continue de faire face à des changements réglementaires, ce qui se répercute sur les plans d’investissement à long terme des sociétés minières. Le nouveau gouvernement mexicain a annoncé son intention de revoir l’interdiction d’exploitation minière à ciel ouvert et les approbations de permis. Toutefois, de nouvelles incertitudes quant à l’approvisionnement futur font leur apparition en raison d’une réduction prévue de 9,2 % du budget du Service géologique du Mexique en 2025, ce dernier jouant un rôle crucial dans l’exploration de nouveaux gisements et la réactivation de gisements existants¹². Le gouvernement a également proposé une augmentation des redevances en 2024, ce qui risque de freiner des investissements d’environ 6,9 G$ US au cours des deux prochaines années¹³.

De plus, en 2024, les coûts d’exploitation minière en Amérique latine ont augmenté de 84 % au Pérou et de 58 % au Mexique par rapport à ceux de 2019, tandis que les coûts aux États‑Unis ont augmenté de 16 %, comparativement aux coûts mondiaux d’exploitation minière de 14,04 $ US l’once, en hausse de 38 %. Cette augmentation est principalement attribuable aux coûts de main‑d’œuvre, qui ont augmenté de 38 % au cours des cinq dernières années¹⁴.

The Silver Institute²¹

En outre, la Norme consolidée relative à l’exploitation minière, qui a été établie afin d’éviter le chevauchement de multiples normes et de proposer des normes minières responsables unifiées, combine les objectifs de quatre normes reconnues : The Copper Mark, l’initiative Vers le développement minier durable (VDMD) de l’Association minière du Canada, les principes d’exploitation minière aurifère responsable du World Gold Council et les principes d’exploitation minière du Conseil international des mines et métaux. Plusieurs sociétés minières font partie du groupe consultatif sectoriel se penchant sur cette norme et, pour ces sociétés, l’argent constitue un produit de base dérivé (exploitation du plomb‑zinc (31 %), du cuivre (27 %) et de l’or (14 %)); par conséquent, la mise en œuvre de cette norme unifiée renforcera également la transparence et la crédibilité des activités d’extraction d’argent associées.

Qu’est‑ce qui favorise le renforcement de la résilience des entreprises à long terme?

Adoption de techniques d’extraction novatrices pour stimuler la productivité et améliorer la sécurité

Les sociétés minières examinent et mettent en œuvre de nouvelles méthodes d’extraction afin d’améliorer l’efficacité opérationnelle. Par exemple, Hecla Mining a mis en œuvre, dans sa mine Lucky Friday, la méthode d’extraction par gradins droits avec berne fermée (Underhand Closed Bench – UCB), qui utilise des techniques de forage et de dynamitage de pointe. La méthode UCB a permis d’améliorer le contrôle en cas de ruptures de failles sismiques, assurant une meilleure sécurité, et de produire plus d’argent en sept mois qu’il aurait été possible de le faire en un an²².

Intégrer les technologies numériques et l’innovation pour créer de la valeur à long terme pour les sociétés minières

La hausse de la demande d’argent a poussé les sociétés minières à investir dans les technologies numériques et les techniques géophysiques afin d’accélérer le processus d’exploration et de réduire les risques liés à l’investissement. Par exemple, Aya Or & Argent a mené à bien le programme d’exploration à sa mine d’argent de Zgounder et le projet Boumadine au Maroc en utilisant l’imagerie spectrale haute résolution et la technologie géophysique²³.

Les sociétés minières optimisent également l’utilisation des véhicules autonomes. Par exemple, Newmont a déployé le boulonneur DS422i de Sandvik dans sa mine aurifère souterraine Cerro Negro afin de solidifier les murs de la galerie avec une précision chirurgicale au moyen d’un mélange d’eau, de ciment et d’additifs malaxés automatiquement²⁴.