L’évolution des attentes des clients fait en sorte que les sociétés de gestion de patrimoine canadiennes doivent de plus en plus appliquer une approche du service à la clientèle reposant aussi bien sur le numérique que sur un modèle hybride. Les sociétés de gestion de patrimoine qui sauront tirer parti d’une telle occasion d’évoluer pourront se positionner de façon non plus seulement à se concentrer sur la fidélisation de leur clientèle, mais également à se bâtir un avenir globalement plus durable.
Comment les préférences des Canadiens en matière de gestion de patrimoine évoluent‑elles?
Une étude mondiale sur la gestion de patrimoine réalisée par EY révèle que plus de 40 % des clients canadiens privilégient désormais les interactions avec un robot conseiller pour établir le cadre de leur planification financière, obtenir des conseils et faire d’autres activités connexes. Il s’agit d’une hausse de 30 % par rapport à 2021, ce qui indique un changement de tendance marqué quant au type d’expériences que les clients s’attendent à avoir.
Dans les faits, près de la moitié des clients canadiens privilégient un modèle de gestion de patrimoine hybride, plutôt qu’un modèle strictement numérique ou un modèle faisant uniquement appel à un conseiller. Quelles sont les autres tendances observées?
Selon notre étude, les clients des sociétés de gestion de patrimoine canadiennes :
- sont plus portés à recourir à des outils numériques et virtuels qu’auparavant;
- sont de plus en plus ouverts à l’idée de changer de prestataire de services ou de transférer leurs avoirs chez un autre prestataire au cours des trois prochaines années;
- sont à la recherche d’expériences et de recommandations personnalisées répondant à leurs besoins particuliers;
- s’attendent à bénéficier d’une plus grande transparence et d’informations plus claires dans la gestion globale de leur portefeuille.
De toute évidence, un tel appétit pour le changement repose sur des considérations qui vont au‑delà de la conversion au numérique vue comme une fin en soi. Le déploiement à grande échelle des technologies numériques peut aider les sociétés de gestion de patrimoine à réinventer le parcours client de bout en bout, de façon à suivre l’évolution des attentes de leur clientèle. Il favorise la fidélisation des clients et le recrutement d’une nouvelle clientèle. En outre, notre analyse de rentabilité englobe le recrutement et la fidélisation d’une main‑d’œuvre qualifiée. Comment est‑ce possible?
Les conseillers qui sont outillés pour offrir des expériences clients et des expériences de collaboration enrichies peuvent désormais jouer un rôle dans la production de meilleurs résultats. Les sociétés de gestion de patrimoine qui se convertissent progressivement au numérique leur permettent aussi de faire preuve de plus de facilité, d’efficacité et d’efficience au travail. Sur un marché de l’emploi où la concurrence entre les employeurs est très vive, bien qu’un rééquilibrage soit en cours, il peut s’agir d’une proposition attrayante.
Qu’est‑ce qui retient les gestionnaires de patrimoine de se convertir au numérique?
Les conseillers en gestion de patrimoine canadiens ne sont généralement pas reconnus pour leurs capacités numériques. Par le passé, les prestataires de services ont souffert du manque de systèmes fondamentaux permettant le partage de données et la transformation des expériences clients de bout en bout. L’intégration des flux de travail entre différentes plateformes et la gestion des données au sein des plateformes principales constituent également des enjeux persistants. Entre‑temps, les grandes entreprises manquent souvent de l’agilité organisationnelle requise pour mettre en corrélation les divers types d’expérience offerts, toutes marques et tous canaux confondus, ce que leur permettrait d’utiliser des plateformes ou des processus unifiés de grande puissance.
Au Canada, du point de vue des ressources humaines, les conseillers continuent de privilégier les interactions en personne, alors que des fonctionnalités numériques pourraient générer la même valeur en toute transparence, bien que le marché soit en quête de nouveauté. Cette situation prévaut dans un contexte de réglementation en rapide évolution, tandis que de nouvelles exigences de conformité sont prescrites chaque année.
D’une part, des sociétés de gestion de patrimoine pourraient considérer que de tels obstacles freinent désormais la réalisation d’investissements dans les technologies numériques. D’autre part, celles qui intensifient leurs investissements dans ces technologies pourraient en tirer un avantage stratégique leur permettant de maintenir leurs activités en cette période d’instabilité, tout en favorisant la génération d’une valeur durable à long terme. Une société de gestion de patrimoine peut elle véritablement se permettre de passer outre à une telle occasion?
Qu’est‑ce que les sociétés de gestion de patrimoine peuvent faire dès maintenant pour accélérer leur conversion au numérique?
La première étape du processus de conversion au numérique consiste à procéder à une analyse globale des lacunes actuelles et des principales possibilités connexes. Les clients s’attendent à bénéficier d’un processus de gestion de patrimoine global et connecté. La désignation et la priorisation des investissements qui sont susceptibles de donner une impulsion maximale à la prestation d’une expérience client numérique ou hybride constituent un bon point de départ. Il convient d’évaluer les aspects où l’exploitation des technologies numériques peut s’avérer particulièrement avantageuse, de l’étape de l’accueil de la clientèle jusqu’à celle de l’établissement de points de contact favorisant la génération de valeur en continu. Il y a tout lieu de se concentrer sur les facteurs qui présentent le plus grand potentiel d’amélioration rapide de l’expérience client.
Une excellente façon d’amorcer ce processus peut consister à se poser les quatre questions suivantes :
1. Comment pouvons‑nous exploiter les technologies numériques de façon à produire de meilleures informations en matière d’investissement? La formulation de recommandations en matière d’investissement fait partie intégrante d’un bon service à la clientèle. Les sociétés de gestion de patrimoine qui ont la capacité de procéder à des analyses d’actifs par secteur, ou d’appliquer d’autres types de filtres, de façon à évaluer la performance des investissements d’un client par rapport à ses objectifs d’investissement particuliers peuvent avoir avec lui des interactions beaucoup plus personnalisées. Les conseillers qui peuvent s’appuyer sur des capacités numériques sont également à même de communiquer à leurs clients des informations à jour grâce auxquelles ceux‑ci peuvent savoir la mesure dans laquelle la performance de leurs investissements se compare à la performance globale du marché. C’est ainsi que les gestionnaires de patrimoine peuvent se permettre de se passer des informations sommaires qui leur sont transmises par courriel, et qui sont déjà désuètes au moment de leur réception, et de s’appuyer plutôt sur une approche quasi en temps réel, qui génère une valeur accrue et qui les amène à agir davantage en tant que partenaires stratégiques des clients, aux fins de la réalisation des objectifs financiers de ces derniers.
2. Une plus grande capacité d’agrégation de données peut‑elle favoriser une meilleure planification de patrimoine? Les plans financiers efficaces sont intégrés de façon à regrouper différents objectifs, actifs et stratégies au sein d’un seul et même programme assorti d’obligations de reddition de comptes. Les clients aspirent de plus en plus à obtenir une vision globale de leurs avoirs et des progrès réalisés dans la planification de leur patrimoine. Ils souhaitent aussi obtenir un aperçu de l’ensemble de leur patrimoine prenant en compte tous les prestataires de services d’investissement et les catégories d’actifs, y compris les actifs moins liquides tels que les biens immobiliers, les produits de luxe et les œuvres d’art, entre autres. L’agrégation des données numériques peut faciliter l’obtention de telles informations. Elle permet également aux conseillers de formuler des recommandations et des stratégies beaucoup plus ciblées.
3. Le recours à des outils numériques facilite‑t‑il tout en général? L’utilisation d’une plateforme numérique adéquate peut se traduire par la rationalisation des efforts à fournir, qu’il s’agisse des modalités entourant la réception, l’examen et la signature de documents par les clients ou de la façon dont ceux‑ci gèrent leurs activités de production de rapports et leurs obligations de conformité. C’est ainsi que les clients et leurs conseillers peuvent gagner du temps, tout en obtenant des informations plus utiles. Les alertes et les applications numériques, entre autres, peuvent s’avérer utiles pour améliorer les expériences clients et offrir à la clientèle les expériences hybrides et équilibrées qu’elle recherche maintenant.
4. Dans quels secteurs organisationnels les capacités numériques pourraient elles permettre le décloisonnement des activités d’exploitation et des activités d’exécution? Dans l’ensemble du marché canadien, les gestionnaires de patrimoine établissent généralement une séparation entre, d’une part, les forfaits de service complet offerts – dans le cadre desquels ils définissent les objectifs à atteindre, élaborent les portefeuilles de leurs clients et en assurent la gestion pour le compte de ces derniers – et, d’autre part, les options de négociation conférant un rôle plus actif à la clientèle. Du fait de cette séparation historique, les clients qui souhaitent assumer eux mêmes la gestion d’une partie de leur propre portefeuille doivent habituellement agir en vase clos, sans savoir la mesure dans laquelle leur stratégie d’exécution est globalement alignée sur les décisions de leur conseiller à l’égard des autres composantes de leur portefeuille. Le recours aux technologies numériques peut favoriser la génération d’une plus grande valeur pour le client, ouvrant des perspectives claires sur l’ensemble des aspects de la gestion de patrimoine.