- Pas moins de 96 % des banques suisses interrogées – et c’est un record – prévoient une augmentation de leur résultat opérationnel en 2023
- Les bénéfices élevés des dernières années devraient être utilisés pour renforcer les fonds propres ou investis dans le développement des modèles d’affaires
- Les banques suisses continuent d’afficher une grande confiance dans le marché immobilier ; seuls 22 % d’entre elles s’attendent à court terme à une augmentation des besoins de correctifs de valeur pour les financements de logements
- Les banques tablent sur un renforcement de l’activité de surveillance de la FINMA (67 %) ainsi que sur un durcissement des prescriptions en matière de liquidités (62 %) et de fonds propres (40 %) à la suite du rachat de Credit Suisse
- 82 % des établissements interrogés déclarent s’intéresser au thème de l’intelligence artificielle, mais seulement 20 % des banques envisagent des cas d’application dans le domaine du conseil à la clientèle et du conseil en placement
Zurich, le 11 janvier 2024 – Le baromètre des banques 2024 d’EY le montre : les banques suisses ont dans l’ensemble réalisé une fois encore un excellent exercice. Pour 2023, 96 % des établissements suisses interrogés prévoient une augmentation de leur résultat opérationnel. Ce chiffre record est encore une fois supérieur de 18 points de pourcentage à celui de 2022. Les banques ont une grande confiance dans leurs forces et se montrent extrêmement optimistes en ce qui concerne l’avenir prévisible. 87 % des banques interrogées tablent sur une hausse de leurs revenus à court terme. Par ailleurs, 89 % des établissements misent sur une hausse de leurs revenus à long terme. Ce sentiment positif prévaut malgré un environnement très difficile, marqué par une escalade géopolitique, des faillites bancaires, une inflation persistante et un ralentissement conjoncturel. « En 2023, les taux d’intérêt élevés, de faibles correctifs de valeur et une économie résiliente conduisent à des résultats record chez les banques interrogées », déclare Patrick Schwaller, Managing Partner Audit Financial Services.
Les banques entendent utiliser les bénéfices supérieurs à la moyenne réalisés ces deux dernières années de différentes manières. Alors que les banques de détail souhaitent avant tout conserver leurs bénéfices plus élevés pour renforcer leurs fonds propres et, partant, leur résilience (72 % des banques régionales et 42 % des banques cantonales), les banques de gestion de fortune ont surtout l’intention d’investir dans le développement de leurs modèles d’affaires (38 % des banques étrangères et 30 % des banques privées). Seuls 8 % des banques interrogées veulent investir dans l’amélioration de l’utilité client, ce qui est étonnant compte tenu des attentes croissantes de la clientèle et de la complexification de ses demandes. « Les banques suisses ont réalisé deux exercices d’excellente facture. Il s’agit désormais de poser des jalons pour l’avenir et d’investir dans un développement axé sur l’avenir » déclare Olaf Toepfer, Partner, associé responsable Banking & Capital Markets.
Confiance dans le marché suisse de l’immobilier et dans les PME
La demande toujours forte sur le marché immobilier, due à une immigration nette stable et à un recul de l’activité de construction, semble continuer à soutenir les prix, en particulier dans le segment de la construction de logements. Les banques suisses ne prévoient aucun changement de tendance et restent très confiantes quant à la résilience du marché immobilier, puisque seuls 22 % des établissements interrogés misent à court terme sur une augmentation des besoins de correctifs de valeur pour les financements de logements (année précédente : 31 %). Cette valeur est donc nettement inférieure à celle de 2022. La comparaison à long terme de cette question montre que le marché suisse de la propriété s’est révélé plus robuste qu’attendu ces dernières années. Dans le sillon de la pandémie de coronavirus en 2020, 58 % des établissements interrogés s’attendaient encore à une augmentation à court terme du besoin de provision pour risque de crédit pour les financements de logements en propriété.
Les banques interrogées ont aussi beaucoup plus confiance dans les PME suisses : dans le domaine du financement des PME, à peine 42 % des banques tablent encore sur une augmentation des pertes de crédit au cours des années à venir. Soit une baisse de 17 points de pourcentage par rapport à 2022. « Le constat est très étonnant compte tenu d’un environnement difficile marqué par un durcissement des conditions de financement, un ralentissement conjoncturel et une escalade géopolitique croissante. Les banques ont une grande confiance dans la résilience de l’économie nationale », explique Patrick Schwaller.
Les conséquences de la reprise de Credit Suisse
La reprise en urgence de Credit Suisse par UBS a fortement contribué à stabiliser les marchés financiers et a ainsi renforcé la confiance dans la place financière suisse. Les conséquences de cette reprise devraient préoccuper les banques suisses pendant un long moment encore. À la suite de cette réorganisation, des craintes ont par exemple été émises quant à une éventuelle pénurie de l’offre, au sens d’un resserrement du crédit, précisément dans le secteur de la clientèle entreprises. Cela ne devrait pas se produire à court terme. La majorité des banques interrogées (66 %) n’excluent toutefois pas, à moyen et long terme, des adaptations de l’offre dans le secteur de la clientèle entreprises. Les entreprises de taille moyenne, qui ne disposent pas d’un accès direct aux marchés internationaux des capitaux, seraient alors probablement les premières concernées.
En outre, toutes les banques interrogées s’accordent à dire que la reprise en urgence de Credit Suisse par UBS entraînera un renforcement de la réglementation des marchés financiers. Elles s’attendent plus particulièrement à de nouveaux durcissements des exigences en matière de liquidités et de fonds propres (62 % et 40 %) ainsi qu’à une activité de surveillance accrue de la FINMA (67 %). Il reste toutefois à voir dans quelle mesure la confiance peut effectivement être régulée durablement de cette manière.
Les banques suisses et l’utilisation de l’intelligence artificielle
L’intelligence artificielle a bien fait son entrée sur la place financière suisse : 82 % des établissements interrogés déclarent déjà se pencher sur le sujet. Certes, une majorité de banques indiquent se limiter pour le moment à des discussions générales sur le sujet ; cependant un tiers des banques interrogées (32 %) ont tout de même élaboré des premiers cas d’application ou déjà réalisé des projets pilotes. Les applications d’intelligence artificielle ne sont toutefois déjà utilisées de manière opérationnelle que par 6 % des banques interrogées. Elles voient des cas d’application en premier lieu dans les domaines « Réglementation & Conformité » (54 %) et dans l’automatisation des processus (55 %), donc plutôt dans le back-office que dans l’interaction avec la clientèle. En effet, seuls 20 % des banques envisagent actuellement des applications dans le domaine du conseil à la clientèle et du conseil en placement. « Les banques suisses doivent soigneusement veiller à ce que l’IA ne soit pas un vecteur de risques ou de problèmes pour leur établissement, en particulier en ce qui concerne les interactions avec la clientèle, la gestion des risques et la conformité », explique Olaf Toepfer.
Durabilité, écoblanchiment et obligation de publier des informations
Les banques suisses développent leur offre de produits dans le domaine de la durabilité depuis longtemps déjà. Si l’accent a d’abord été mis sur l’offre de placements durables, de plus en plus de banques appliquent désormais des critères ESG lors de l’octroi de crédits. La part des banques qui appliquent déjà des critères ESG lors de l’octroi de crédits s’est envolée, passant de 22 % l’année dernière à 37 % aujourd’hui. Et 35 % ont l’intention de le faire à l’avenir.
Si les banques ne peuvent pas tenir ces promesses ou si elles ne disposent pas des données nécessaires pour le prouver, elles s’exposent davantage à des accusations d’écoblanchiment (greenwashing). Environ deux tiers des banques interrogées continuent à y voir en premier lieu un risque pour leur réputation, mais il est intéressant de constater que les autorités de surveillance de places financières de premier plan prennent des mesures de plus en plus rigoureuses contre le greenwashing, en infligeant parfois aussi de fortes amendes.
Un autre défi attend une grande partie des banques suisses à partir de l’exercice 2024 : le rapport sur les questions climatiques. Concrètement, toutes les banques qui remplissent certains critères de taille devront mettre en œuvre les recommandations du « groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques (TCFD) » dans un rapport public. En outre, le Conseil fédéral a annoncé que la publication d’informations en matière de durabilité prévue par le code des obligations ferait l’objet d’un audit dans un avenir encore indéterminé. L’élaboration d’un rapport avec une base de données vérifiable devrait être un projet d’envergure pour de nombreuses banques et comporter quelques pierres d’achoppement. Dans le domaine de la durabilité, un tiers des banques considèrent aussi que la publication d’informations en matière de durabilité représente le plus grand défi opérationnel.
À propos du baromètre des banques 2024
Plus de 100 banques suisses ont été interrogées en novembre 2023 dans le cadre du baromètre des banques EY 2024. L’étude est menée depuis 2010, pour la 14e fois cette année. 65 % des établissements interrogés sont situés en Suisse alémanique, 28 % ont leur siège en Suisse romande et 7 % sont domiciliés au Tessin. Les banques interrogées appartiennent aux catégories suivantes : banques privées (32 %), banques étrangères (24 %), banques régionales (26 %) et banques cantonales (18 %).