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Actifs immobiliers life science: la classe d’actifs du futur


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Les actifs immobiliers life science peuvent permettre de diversifier les portefeuilles d’investissement. Mais qu’est-ce qui se cache derrière cette classe d’actifs?


En résumé

  • À la faveur de l’augmentation continue des dépenses de recherche et de développement, le secteur des sciences de la vie semble promis à une croissance dynamique et durable.
  • La pandémie de COVID-19 a joué un rôle de catalyseur, rappelant à tous l’importance du marché des sciences de la vie européen.
  • Les investisseurs qui veulent accroître leurs rendements grâce aux entreprises et à l’investissement immobilier doivent considérer l’écosystème des sciences de la vie dans son ensemble et ne pas se limiter à la pierre.

15 novembre 2022: l’humanité franchit la barre des 8 milliards d’habitants. La population mondiale a été multipliée par trois depuis 1950. Et malgré la baisse de la natalité, la population mondiale devrait continuer de croître demain. Cette évolution s’explique par l’allongement de l’espérance de vie, grâce aux progrès de la médecine, par l’amélioration des conditions de travail, de l’alimentation et des conditions sanitaires, et par la hausse de la prospérité. On estime que la population mondiale croîtra de près de 21% d’ici 2050, et de quelque 36% d’ici 2100. Le mode de vie moderne favorise l’apparition des maladies dites de civilisation (ex.: hypertension, diabète, cancer). La concentration de la population dans les mégapoles et la densité démographique en Asie ou en Afrique favorisent le déclenchement de chocs exogènes comme la pandémie de COVID-19. L'évolution démographique est l’un des facteurs les plus déterminants pour l’économie, et notamment, le vieillissement de la population. La part des plus de 65 ans dans la population, qui s’élève actuellement à 19,1% en Europe, va progresser pour atteindre environ 28,1% en 2050, alors que, dans le même temps, la part des plus de 80 ans sera multipliée par trois1. D’où l’essor que le secteur des sciences de la vie connaît en ce moment, car l’allongement de l’espérance de vie fait naître de nouveaux besoins dans le domaine de la santé. L’innovation, en particulier dans le domaine des diagnostics moléculaires et de l’e-santé (ou santé numérique), ouvre de nouvelles perspectives de croissance dans le secteur des sciences de la vie.
 

Des tendances mondiales sous-tendent l’évolution du marché des sciences de la vie et celle des actifs immobiliers life science
 

L’immunologiste japonais Tasuku Honjo disait que: «Life Science is an investment for the future». Qu’il s’agisse de l'évolution démographique, de la préoccupation croissante de la population pour les questions de santé ou de la recrudescence des maladies chroniques due aux nouveaux modes de vie ou à la concentration de la population dans de grands centres urbains. D’autant plus que l’homme veut vivre plus longtemps et en bonne santé. Médicaments, vaccins, mesures pour allonger l’espérance de vie, travaux de recherche sur le cancer et les anomalies génétiques... L’industrie des sciences de la vie est à pied d'œuvre pour lui offrir cette vie. Tous ces développements feront de la santé l’un des secteurs les plus captivants au cours des 20 prochaines années. Toutefois, l’évolution d’un actif immobilier life science et de son emplacement dépendra également de l’action conjuguée des facteurs micro et macro suivants.

Emplacement:
 

  • La proximité géographique est un facteur de réussite pour les acteurs du secteur des sciences de la vie. C’est la raison pour laquelle les emplacements qui mettent l’accent sur la recherche réunissent généralement des instituts de recherche publics ou privés, des établissements d’enseignement et leurs spin-off, des start-up et des incubateurs.
  • Créer un cadre de qualité et éviter la monoculture en encourageant l’implantation de restaurants, de commerces, de logements et de divertissements dans le quartier.
  • Renforcer l’attractivité de l’emplacement et encourager l’implantation d’acteurs divers à proximité, pour créer un pool de main-d'œuvre potentielle dans la région.
  • La proximité d’infrastructures aéroportuaires, autoroutières et de transports publics rend l’emplacement plus intéressant aux yeux des acteurs internationaux qui seraient susceptibles de s’y implanter.
  • Accessibilité des principaux sièges européens en moins de 2 heures (en avion).
  • La Suisse a des frontières communes avec l’Italie, l’Allemagne et la France – trois des principaux marchés pharmaceutiques européens – et dispose d’un des plus importants viviers de compétences d’Europe dans le domaine des sciences de la vie.
     

Qualité de vie:
 

  • Dans le contexte des actifs immobiliers life science, le facteur de la qualité de vie se compose des dimensions suivantes: revenu et emploi, logement, santé, éducation, qualité et environnement, sécurité personnelle, participation civique et équilibre entre vie professionnelle et vie privée.
  • Plus la qualité de vie d’un emplacement est élevée, plus il sera attractif aux yeux des groupes nationaux et internationaux qui seraient susceptibles de s'y implanter. Et en retour, une qualité de vie élevée a une incidence positive sur les activités locales de recherche et de développement.
  • Les villes suisses de Zurich, Genève et Bâle font partie des 10 meilleures du monde en termes de qualité de vie.
     

Cadre réglementaire:
 

  • Le cadre réglementaire et fiscal d’un pays, l’accès au capital et la concurrence existante sont des critères de choix décisifs pour juger de la pertinence d’un emplacement.
  • La Suisse offre des conditions générales idéales pour les entreprises pharmaceutiques internationales qui souhaitent établir leur siège principal en Europe (> 850 entreprises internationales).
  • Les entreprises établies en Suisse bénéficient des accords de libre-échange UE/AELE avec 40 pays ainsi que d’une politique fiscale avantageuse qui, conjuguée à un système juridique bien établi, garantit la sécurité juridique.
     

Actifs immobiliers life science: une nouvelle classe d’actifs en plein essor
 

Les actifs immobiliers life science sont encore une nouvelle catégorie d’actifs pour les investisseurs européens. La plupart des acteurs du marché n’ont toujours pas développé une compréhension précise de ce que ce type d’affectation englobe. Le secteur des sciences de la vie réunit des sous-spécialités scientifiques très diverses, mais chacune présente un lien avec les domaines de la vie et de la santé. Le secteur des sciences de la vie a pour but d’améliorer la vie. Ses principaux domaines de recherche et de développement sont les biotechnologies, l'industrie pharmaceutique, l’e-santé (ou santé numérique), les technologies médicales, la biologie moléculaire et les sciences de l’environnement. Comme toutes ces spécialités mènent leurs travaux de recherche et leurs développements de produits sur des organismes vivants, leur personnel et leurs bâtiments (laboratoires, zones de production, etc.) doivent répondre à des exigences plus strictes.
 

Compte tenu de l’allongement de l’espérance de vie que nous avons déjà évoqué, de la préoccupation croissante de la population pour les questions de santé et de l’augmentation des maladies de civilisation liée au vieillissement de la population, les actifs immobiliers life science sont devenus incontournables. Comme les actifs life science sont assez résilients face aux fluctuations de la demande à court terme, ils sont de plus en plus prisés par les investisseurs immobiliers. Par conséquent, en inclure dans son portefeuille peut permettre d’augmenter le rendement tout en accroissant la diversification. La tendance au télétravail et à la numérisation, du fait de la pandémie de COVID-19, n’a pas autant de répercussions dans le secteur des sciences de la vie, car un grand nombre d'activités ne peuvent être réalisées qu’en laboratoire. Mais les limites de cette classe d'actifs restent floues, car on peut aussi y inclure les biens immobiliers des entreprises (bureaux, bâtiments à usage mixte), les campus de santé et d’innovation, la logistique pharmaceutique (entrepôts, pharmacies traditionnelles et de vente par correspondance) et les actifs immobiliers de l’industrie légère.
 

Actifs immobiliers life science européens: le nouveau «core»?
 

Si l’on en juge par les données du marché, les investisseurs s’intéressent de plus en plus à la classe d'actifs life science en Europe.
 

Les dépenses totales pour la recherche et le développement pharmaceutiques sont en augmentation continue depuis 2010, que ce soit au niveau mondial, européen ou national. Par rapport à 2010, on prévoit, pour l’année 2022, des dépenses d’environ 236 milliards d’euros (+86,1%) au niveau mondial, 42,7 milliards d’euros (+53,2%) au niveau européen et  7,4 milliards d’euros (+32,6%) au niveau national. Cette évolution laisse présager que les dépenses de recherche et de développement pharmaceutiques continueront d’augmenter au cours des prochaines années (2028: environ 283 milliards d’euros en Europe)2.
 

Ces dernières années, le marché life science européen suscite un intérêt grandissant auprès des investisseurs internationaux. Par rapport au marché immobilier états-unien, des biens comparables peuvent y être achetés pour 40% moins cher environ. Autre argument en faveur du marché européen: les coûts d’exploitation pour une entreprise de biotechnologies en Europe sont environ 50% moins élevés qu’aux États-Unis. En outre, l’Europe dispose de bonnes infrastructures et d'un système juridique à la fois sûr et cohérent, tandis que les salaires versés dans le secteur des sciences de la vie européen sont comparativement plus faibles qu’à l’international.
 

Univers d’investissement des actifs life science européens
 

En examinant les transactions immobilières qui ont été réalisées depuis 2015, on constate qu’en 2020, les investissements dans les actifs life science ne représentaient que 0,5% de tous les investissements immobiliers. En 2015, cette part s’élevait encore à 1,4% (ULI, 2022). Ces résultats renforcent notre hypothèse selon laquelle les actifs life science restent, pour de nombreux investisseurs européens, une classe d’actifs immobiliers méconnue. Pourtant, ces actifs sont très résistants face aux crises, car ils présentent un mix d’affectation équilibré, et ils sont l’objet d’une demande croissante liée à l’évolution démographique. Pour toutes ces raisons, on peut s’attendre à ce qu’ils soient de plus en plus prisés par le marché à l’avenir.
 

Sur les 24 derniers mois, les trois régions ayant attiré le plus d’investissements LSRE (Life Science Real Estate) sont le Royaume-Uni (44,26%), les pays du Benelux (28,46%) et la région DACH (11,92%). Les pays du Benelux et de la région DACH affichent tous une intensité de R&D de plus de 3,0% par rapport à leur produit intérieur brut (PIB), un niveau bien supérieur à la moyenne européenne de 2,27% (Banque mondiale, 2022). Bien que l’intensité de R&D s’élève à 1,17% environ au Royaume-Uni (Banque mondiale, 2022), le pays se hisse à la deuxième place en Europe pour ce qui est du nombre d’emplois dans le secteur technico-médical, et il abrite l’un des plus grands clusters mondiaux dans le domaine des sciences de la vie (le «Golden Triangle»).
 

Le profil des investisseurs dans les actifs life science est plus contrasté. Selon une analyse de ULI (2020) sur la période 2015 à 2020, ce sont principalement des gérants de fonds qui ont investi dans des biens life science. Mais le panorama des investisseurs a changé ces 24 derniers mois, durant lesquels des développeurs de projets et des gestionnaires de placements ont réalisé la plupart de ces investissements (sur la base d’une évaluation propre de données RCA au 31 décembre 2022).
 

Le regroupement en clusters booste la productivité et favorise le partage des connaissances
 

Dans le secteur des sciences de la vie, on observe une certaine proximité géographique entre les différents acteurs, qui se regroupent en clusters. Ils mettent un accent particulier sur la recherche, qui implique des transferts de connaissances mutuels. Le regroupement en clusters est donc d’une importance capitale pour leur survie. En effet, un cluster favorise la collaboration entre les entreprises d’une même région. Le regroupement en clusters d’acteurs du même secteur crée des synergies entre les différentes spécialités, d’une part; et d’autre part, cette proximité est propice à une collaboration plus étroite entre les entreprises concernées. Il en résulte un accroissement de la compétitivité tant au niveau national qu'international. Des études empiriques montrent que les clusters régionaux sont 10 à 40% plus productifs en moyenne que leurs concurrents isolés.
 

L’illustration ci-dessous présente les principaux clusters européens dans le secteur des sciences de la vie.
 



Real Estate News 2023

 

Le dernier numéro de "Real Estate News 2023" donne un aperçu de l'actualité économique, technologique, fiscale et juridique du secteur immobilier.


  1. Population growth and demographic change data based on the UN World Population Prospects (2022)
  2. Based on the World Preview 2022 Outlook to 2028: Patents and Pricing by Evaluate Pharma (2022), Efpia Report 2022, Pharma Markt Schweiz by Interpharma and Switzerland as a pharma hub by Switzerland Global Enterprise

Résumé
 

Les sciences de la vie sont devenues un écosystème florissant qui mêle l’État et les entreprises du secteur, sans oublier les établissements d’enseignement et leurs spin-off. Mais la clé de la réussite pour cet écosystème, c’est la participation de sa quatrième composante, à savoir la société. En effet, c’est bien la société qui définit comment le secteur des sciences de la vie est perçu, et la population qui soutient ou non les implantations d’entreprises à tel ou tel endroit. Et cette acceptation par la population a une influence déterminante sur le marché locatif, et donc sur la performance des actifs immobiliers life science sur le long cours.
 

Remerciements
 

Nous remercions Annabell Nachbaur et Alessandro Lanzarotti pour leur précieuse contribution à cet article.



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