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Québec publie une liste des opérations à divulgation obligatoire

Personne-ressource locale

EY Canada

5 avr. 2021
Objet FiscAlerte
Pays et territoires Canada

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FiscAlerte 2021 numéro 14, 5 avril 2021

Le 17 mars 2021, la première série d’opérations déterminées qui devront dorénavant faire l’objet d’une divulgation obligatoire au Québec en vertu du projet de loi n42 du Québec, Loi donnant suite à des mesures fiscales annoncées à l’occasion du discours sur le budget du 21 mars 2019 et à certaines autres mesures, a été publiée dans la Gazette officielle du Québec. Le projet de loi n42 du Québec, qui a été sanctionné le 24 septembre 2020, comprend des mesures annoncées initialement dans le budget du Québec du 21 mars 2019 et précisées ultérieurement par le ministère des Finances dans le bulletin d’information 2019-5 publié le 17 mai 2019 en ce qui a trait aux nouvelles obligations de divulgation, y compris en ce qui a trait aux opérations déterminées par le ministre du Revenu ou aux opérations s’y apparentant de façon significative.

Publiée dans le cadre d’un nouveau règlement intitulé Règlement concernant les opérations à divulgation obligatoire (le « Règlement »), la liste comprend, pour l’instant, quatre types d’opérations :

  • Évitement de l’aliénation réputée d’un bien d’une fiducie
  • Paiement vers un pays non conventionné
  • Multiplication de la déduction pour gain en capital
  • Commerce d’attributs fiscaux

Mise en contexte

Cette mesure relative à la divulgation obligatoire s’inscrit dans une série de nouvelles mesures mises de l’avant par le gouvernement québécois dans la lutte menée contre les planifications fiscales agressives1. Le projet de loi no 42 modifie notamment l’article 1079.8.1 de la Loi sur les impôts (Québec) (la « LI ») de manière à y inclure la définition d’« opération désignée », tout en imposant aux contribuables, conformément à l’article 1079.8.6.2 de la LI, une nouvelle obligation de divulguer dans une déclaration de renseignements toutes les opérations déterminées par le ministre qu’ils réalisent. Depuis l’adoption du projet de loi n42, les contribuables attendaient que le ministre publie la liste des opérations déterminées.

Depuis le 18 mars 2021 (le lendemain de la date de publication du Règlement dans la Gazette officielle du Québec), les contribuables qui réalisent l’une ou l’autre des quatre opérations déterminées (ou une série d’opérations comprenant une telle opération), ou les contribuables qui sont membres d’une société de personnes qui réalise une telle opération ou série d’opérations, ont l’obligation de divulguer l’opération (ou toute opération dont la forme et la substance des faits s’apparentent de façon significative à celles d’une opération déterminée par le ministre) à l’aide du formulaire TP-1079.DI, Divulgation obligatoire ou préventive d’une planification fiscale, dans un délai donné à partir du jour pertinent prévu par le Règlement. Revenu Québec a aussi publié sur son site Web des exemples d’opérations qui seraient considérées comme des «opérations incluses » ou des « opérations exclues ».

Ce que vous devez savoir – qui, quoi, quand?

Cette nouvelle obligation de divulgation est censée s’appliquer prospectivement. Ainsi, toute opération désignée, c’est-à-dire toute opération déterminée ou opération s’y apparentant de façon significative réalisée par un particulier, une société de personnes2, une fiducie ou une société à partir du 18 mars 2021 devra être divulguée. Dans le cas d’une série d’opérations, l’obligation de divulgation peut s’appliquer même si la série a commencé avant le 18 mars 2021. Cette obligation vise aussi tout conseiller ou promoteur3 qui commercialise une opération désignée ou qui en fait la promotion. Il importe de souligner que la qualification d’un promoteur aux fins de la LI diffère de la définition de ce terme dans la Loi de l’impôt sur le revenu fédérale.

Jusqu’ici, Revenu Québec n’a pas fourni d’autres précisions quant à la portée du terme « promoteur » ni donné de lignes directrices permettant de distinguer clairement un promoteur d’un conseiller en vertu de la LI4. Revenu Québec a cependant indiqué qu’un conseiller ne serait pas considéré comme ayant commercialisé une opération ou en ayant fait la promotion du simple fait qu’il a conçu une planification à la demande du client ou qu’il l’a mise en œuvre, ou lorsqu’il fournit de l’aide, de l’assistance ou des conseils relativement à l’opération; toutefois, le fait de proposer à un nouveau client une structure quasi identique à celle proposée antérieurement à un autre client pourrait être assimilable à la promotion de la structure.

Soulignons également que cette nouvelle obligation de divulgation ne dépend pas de la présence d’un avantage fiscal. En effet, l’obligation de divulgation s’applique sans égard aux conséquences de l’opération désignée.

Comme nous l’avons mentionné, la divulgation obligatoire devra être faite au moyen du formulaire prescrit (TP-1079.DI), disponible en ligne, lequel devra être produit à la plus tardive des dates suivantes :

  1. Le 60e jour suivant celui qui est déterminé par le Règlement, tel qu’il décrit ci-après
  2. Le 120e jour suivant celui de la publication à la Gazette officielle du Québec de l’opération déterminée par le ministre à laquelle l’opération désignée se rapporte — en ce qui concerne les quatre opérations déjà rendues publiques, il s’agit du 120jour suivant la publication du 17 mars 2021, à savoir le 15 juillet 2021

Les conseillers et les promoteurs sont assujettis à un délai semblable pour la divulgation des opérations désignées. Par contre, ils ont l’option de produire une divulgation plus générale afin de préserver l’anonymat de leur client. La divulgation est faite dans le formulaire TP‑1079.CP, Divulgation obligatoire d’une planification fiscale par un conseiller ou un promoteur.

Pour les membres d’une société de personnes, une seule divulgation est requise et vaudra pour tous les membres.

Bien que ces nouvelles mesures soient destinées à accroître la transparence du régime fiscal et à décourager le recours aux stratagèmes abusifs, la divulgation d’une opération désignée ne sera pas considérée comme une admission quant à l’applicabilité de la règle générale antiévitement (« RGAÉ ») prévue dans la LI.

Les quatre opérations déterminées5

Évitement de l’aliénation réputée d’un bien d’une fiducie

La première opération déterminée par le ministre en est une qui aurait pour effet d’éviter l’application des règles d’aliénation réputée des biens d’une fiducie aux 21e anniversaires de la création de cette dernière, règles qui visent à empêcher le report de l’impôt sur les gains en capital accumulés à l’égard de ces biens. Les faits qui ont été déterminés par le ministre sont décrits avec plus de précision dans le Règlement, mais Revenu Québec a donné un exemple du type d’opérations visées. Selon ce qui a été dit, la divulgation obligatoire viserait une situation dans laquelle une fiducie distribuerait, avant son 21e anniversaire, un de ses biens à un bénéficiaire qui est une société contrôlée par une autre fiducie6. Dans une telle situation se produisant après le 17 mars 2021, la fiducie aura l’obligation de divulguer l’opération, et ce, au plus tard le 60e jour suivant la distribution du bien en question ou le 120e jour suivant la publication de l’opération déterminée dans la Gazette officielle du Québec, soit le 15 juillet 2021, selon la date la plus tardive.

Paiement vers un pays non conventionné

Le deuxième type d’opération déterminée publié et décrit dans le Règlement vise les opérations réalisées par des contribuables résidant au Québec faisant partie d’un groupe multinational de sociétés et qui leur permettraient de déduire dans le calcul de leur revenu en vertu de la LI un montant total d’au moins 1 000 000 $ par suite de paiements prévus par un accord entre parties ayant un lien de dépendance (autres que des montants payés ou à payer en contrepartie de l’acquisition d’un bien corporel) en faveur d’un non‑résident du Canada qui réside dans un pays avec lequel le gouvernement du Québec ou celui du Canada n’a pas alors conclu d’accord fiscal. Ces paiements comprendraient les intérêts, les frais de gestion (ou frais pour d’autres services), les redevances, etc., mais Revenu Québec n’a pas encore donné d’exemples des types d’opérations qui pourraient être visés. Néanmoins, Revenu Québec a précisé qu’un « accord fiscal » ne comprend pas les accords d’échanges de renseignements fiscaux avec un pays avec lequel le Canada n’a pas de convention fiscale.

De plus, Revenu Québec a clairement affirmé qu’une divulgation ne serait pas considérée comme complète si la série d’opérations n’y est pas divulguée dans son intégralité.

L’obligation de divulgation s’applique à compter du jour qui précède de 60 jours la date d’échéance de production pour l’année d’imposition au cours de laquelle le contribuable a déduit le montant de son revenu. Si le contribuable est un membre d’une société de personnes, l’obligation s’applique à compter du jour qui précède de 60 jours la date d’échéance de production applicable au membre de la société de personnes pour son année d’imposition dans laquelle se termine l’exercice financier de la société de personnes donné (l’exercice donné étant celui au cours duquel la société de personnes a déduit le montant de son revenu).

Par conséquent, la divulgation de l’opération désignée devra être faite au plus tard à la date d’échéance de production applicable au contribuable ou le 15 juillet 2021, selon la date la plus tardive.

Multiplication de la déduction pour gain en capital

La troisième opération déterminée n’est pas une surprise. Elle vise les opérations qui donnent lieu à la multiplication de la déduction pour gain en capital entre plusieurs contribuables, notamment par le biais d’une fiducie ou par un transfert d’actions d’une société entre conjoints. Au moment d’écrire ces lignes, Revenu Québec avaient relevé deux exemples de ce type d’opérations : une opération semblable à celle qui avait été réalisée dans l’affaire Laplante c. La Reine, 2017 CCI 118 (décision qui a par la suite été confirmée par la Cour d’appel fédérale [2018 CAF 193]), soit une opération dans laquelle une partie utilise des « accomodateurs » (les bénéficiaires d’une fiducie, par exemple) pour bénéficier plusieurs fois de la déduction pour gain en capital (chaque bénéficiaire retournant la partie du gain en capital lui ayant été attribuée à la personne en question après avoir demandé la déduction pour gain en capital à laquelle il avait droit); et l’autre, qui s’apparenterait à l’opération décrite dans la décision Gervais c. Canada, 2018 CAF 3, dans laquelle un contribuable, dans le cadre du remaniement du capital-actions de son entreprise (dans lequel l’épouse du contribuable était devenue actionnaire), utilise le lien de dépendance avec son conjoint ainsi que les règles d’attribution pour réduire l’impôt payable et multiplier la déduction pour gain en capital.

L’opération désignée doit être divulguée au plus tard le 60e jour suivant le jour précisé dans le Règlement (jour qui varie selon le type de planification en cause — p. ex., le jour de l’aliénation des actions admissibles d’une société qui exploite une petite entreprise) ou le 15 juillet 2021, selon la date la plus tardive.

Commerce d’attributs fiscaux

Enfin, la dernière opération déterminée mentionnée dans le Règlement en est une qui donne lieu au commerce d’attributs fiscaux. Bien que le Règlement ait été rédigé de manière à inclure un vaste éventail d’opérations, Revenu Québec a indiqué qu’il s’agirait ici d’une opération s’apparentant à celle décrite dans Deans Knight Income Corporation c. La Reine, 2019 CCI 76 (qui portait sur le commerce de pertes autres que des pertes en capital, de dépenses de recherche scientifique et de développement expérimental et de crédits d’impôt à l’investissement accumulés et inutilisés), ainsi qu’au projet d’opérations dans Birchcliff Energy Ltd. c. Canada, 2019 CAF 151 (affaire qui portait sur le commerce de pertes autres que des pertes en capital).

Un peu comme dans le cas de la deuxième opération déterminée, cette dernière opération devra être divulguée au plus tard à la date d’échéance de production pour la première année d’imposition à l’égard de laquelle l’attribut fiscal est utilisé ou le 15 juillet 2021, selon la date la plus tardive.

Conséquences d’un manquement à l’obligation de divulgation

En cas de non-divulgation, la LI prévoit deux pénalités cumulatives pour le contribuable ou la société de personnes qui réalise l’opération désignée :

  • Une pénalité jusqu’à concurrence de 100 000 $, soit une pénalité de 10 000 $ et une pénalité additionnelle de 1 000 $ par jour, à compter du deuxième jour, que dure l’omission
  • Une pénalité égale à 50 % de l’avantage fiscal

De plus, la période normale de nouvelle cotisation sera prolongée pour permettre au ministre d’établir une nouvelle cotisation fondée sur la RGAÉ. Plus important encore, l’omission de divulguer une opération désignée entraînera la suspension de la période normale de nouvelle cotisation à l’égard de l’opération ou de la série d’opérations en question jusqu’à ce que la déclaration de renseignements requise soit produite. Le délai de prescription recommencera toutefois à courir au moment de la production tardive.

Dans le cas des conseillers et des promoteurs, des pénalités cumulatives seront aussi imposées en cas d’omission de divulguer des opérations désignées :

  • Une pénalité jusqu’à concurrence de 100 000 $, soit une pénalité de 10 000 $ et une pénalité additionnelle de 1 000 $ par jour, à compter du deuxième jour, que dure l’omission
  • Une pénalité égale à 100 % de l’ensemble des montants reçus en contrepartie pour la mise en œuvre de l’opération désignée commercialisée ou promue

Revenu Québec a bien précisé que d’autres opérations déterminées s’ajouteraient dans un proche avenir. Les contribuables doivent donc prendre soin de communiquer avec leurs conseillers pour se tenir au fait de l’évolution des nouvelles obligations de divulgation en vigueur au Québec.

Pour en savoir davantage

Pour en savoir davantage, veuillez communiquer avec votre conseiller EY ou EY Cabinet d’avocats ou avec l’un des professionnels suivants, qui pourra vous aider à produire des divulgations préventives tardives ou vous fournir d’autres conseils en lien avec ces nouvelles mesures.

Stéphane Leblanc
+1 514 879 2660 | stephane.leblanc@ca.ey.com

Benoît Millette
+1 514 879 3562 | benoit.millette@ca.ey.com

Marie-Claude Marcil
+1 514 879 8208 | marie-claude.marcil@ca.ey.com

Stéphanie Brouillard
+1 514 879 8241 | stephanie.brouillard@ca.ey.com

 

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  1. Pour en savoir plus, consultez les bulletins FiscAlerte d’EY 2019 numéro 12, Budget du Québec de 2019-2020, et 2019 numéro 23, Nouvelles obligations de divulgation et pénalités pour les contribuables ainsi que pour les conseillers et promoteurs au Québec. Voir également le bulletin FiscAlerte d’EY 2020 numéro 55, Sanction du projet de loi no 42 du Québec – entrée en vigueur des obligations de divulgation concernant les contrats de prête-nom.
  2. L’obligation de divulgation ne s’applique que si le membre de la société de personnes qui réalise l’opération est visé par l’obligation en question.
  3. Le promoteur de l’opération désignée (ou de la série d’opérations) s’entend d’une personne ou une société de personnes à l’égard de laquelle les conditions suivantes sont remplies :
    • Elle commercialise l’opération ou la série d’opérations, en fait la promotion, ou soutient autrement sa croissance ou l’intérêt qu’elle suscite.
    • Elle (ou une personne ou société de personnes à laquelle elle est liée ou associée) reçoit ou a le droit de recevoir, directement ou indirectement, une contrepartie pour cette commercialisation, cette promotion ou ce soutien.
    • Il est raisonnable de considérer qu’elle exerce un rôle important dans cette commercialisation, cette promotion ou ce soutien.
  4. Selon la LI, un conseiller est défini, à l’égard d’une opération, comme une personne ou une société de personnes qui fournit de l’aide, de l’assistance ou des conseils relativement à la conception ou à la mise en œuvre de l’opération, ou qui la commercialise ou en fait la promotion.
  5. Les opérations déterminées sont énumérées par Revenu Québec à l’annexe A du Règlement aux fins de la définition d’« opération désignée ». Les opérations désignées sont les opérations réalisées par le contribuable qui sont visées par l’obligation de divulgation.

    Suivant l’article 1079.8.1 de la LI, une opération désignée est une opération dont la forme et la substance des faits propres au contribuable s’apparentent de façon significative à la forme et à la substance des faits d’une opération déterminée par Revenu Québec (les opérations déterminées).
  6. Voir, par exemple, le document de l’ARC numéro 2017-0693321C6.

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Renseignements sur les budgets : Pour des renseignements à jour sur les budgets fédéral, provinciaux et territoriaux, visitez notre site ey.com/ca/fr/budget.